Modern Languages and Literatures, Department of

 

Date of this Version

4-2020

Document Type

Presentation

Citation

Blum-Reid, S. (2020) Sylvain Tesson : La Consolation de la forêt. 20th & 21st Century French and Francophone Studies International Colloquium, University of Nebraska-Lincoln, March 26-28, 2020.

https://digitalcommons.unl.edu/ffsc2020/

DOI: 10.32873/unl.dc.ffsc.028

Comments

Copyright © 2020 Sylvie Blum-Reid

Abstract

Sylvain Tesson est né sous les constellations du blaireau et de la forêt.2 Cet écrivain-voyageur, géographe de formation, a passé six mois dans une cabane en Sibérie, à la suite desquels il a publié son journal Dans les Forêts de Sibérie traduit en anglais par The Consolation of the Forest en 2011 (prix Médicis 2011). En plus de ses écrits, il est l’auteur de plusieurs documentaires filmés Aral: Chronique d’une mer asséchée, 2002 (Aral, the Sea than Ran dry, dir. Nicolas Millet, 42 min. , CNC),3 qui dénonce la catastrophe écologique de la mer d’Aral, asséchée depuis les années 60, en raison d’une surproduction de coton, et Seul, 180 jours sur le Baïkal /Alone, 180 days on Lake Baïkal (2011 co-réalisé avec Florence Tran).4 Il a reçu le prix Renaudot pour la Panthère des neiges (2019), son récit au Tibet.

Je m’intéresse au parcours de Tesson dans différentes régions du monde ainsi qu’en France, comme thérapie nécessaire à son équilibre mental ainsi que son implication dans le système écologique de notre planète. Il va de soi que si tout voyage constitue sa thérapie, la forêt en fait partie. Les questions qui ont guidé ma relecture de Dans les forêts de Sibérie dans le but de notre conférence Parler la Terre, sont les suivantes : Quelle est sa vision de la terre et du système écologique, qui s’inscrit au coeur de ses écrits ? Si l’on fouille un peu dans le roman familial de la famille Tesson, on débouche sur le mythe de la cabane et de la forêt tout en sachant que Tesson et sa famille sont virulemment anti-psychanalyse.5 Il est difficile d’expliquer cet état de non-repos permanent de Tesson, que l’on nomme aussi agitation ou fébrilité. Il se démarque par son désir de vivre loin de notre époque et du style de vie ‘moderne’, avec tout ce qu’elle comporte : les médias sociaux, ses addictions au téléphone portable, le haut débit, et ses obsessions avec les ‘hauts taux’ (boursiers et autres), les évaluations, les fonctions ‘j’aime’ sur Facebook, ainsi que l’édification constante des célébrités. Tesson se targue ‘d’être de tous les réseaux asociaux’. Pour compliquer les choses, Dans les Forêts de Sibérie célèbre l’érémitisme, le mode de vie des ermites, s’inscrivant contre le voyage ; ceci le guide dans sa quête d’un havre, très loin de la France dans sa région de prédilection : l’Eurasie. « C’est là que je situe pour l’instant mon domaine de prédilection entre le Pacifique et l’Atlantique » (Petit Traité sur l’immensité du monde 2005 :17). Dans les années 90, il traverse l’Himalaya dans une randonnée de 5000 km parcourant les plaines de l’Asie centrale à cheval, et le monde à bicyclette. Ce mouvement constant peut ressembler à une malédiction pour reprendre l’expression de l’écrivain anglais Bruce Chatwin (qui était lui aussi en mouvement). L’expérience sibérienne trouve son cadre dans le voyage immobile, à la base d’une transformation personnelle, et dans l’autobiographie et l’écrit sur la nature. Tesson, le nomade, l’errant, le trappeur, le ‘wanderer’, le rebelle, le praticien de l’art de la fugue, et de l’appât, échappant à tout réseau, marche à contre-courant, contre l’idée de ‘se ranger (le mot passe mieux en anglais : settling down) c’est à dire former une famille et avoir un emploi sédentaire. Sa famille – le clan des Tesson – accepte et respecte son choix. Son père, Philippe Tesson, journaliste de droite, connu pour ses chroniques littéraires et surtout théâtrales, admire son fils, un ‘anti-moderne’, hors-normes, branché, sauvage et vivant dans l’excès: "Sylvain a besoin de partir loin dans la solitude et l'excès. Il lui faut quitter une société trop étroite pour lui.”

Share

COinS